Timnadin sont chantées uniquement par les femmes des tribus Ait Atta

Timnadin sont chantées uniquement par les femmes des tribus Ait Atta. On ne trouve pas ce genre de poésie nul par ailleurs. Il faut rappeler aussi qu’une poésie abondante d’expression amazighe, traitant de l’immigration a été également chantée dans le Souss et dans le Rif.
Poèmes :
 1- Idda-d Muγa s areḥbiy n Lqelεa
Istey izamaren izri ulli
Mora est venu à l’étable d’El Qelâa[8]
Il a choisi les béliers et laissé les brebis.

2-Idda-d Muγa s lbiru n Msemrir,
Yusi lbennar zrin-aγ ḥayati.
 Mora est venu au bureau de Msemrir[9]
Il a pris les plus précieux et nous a laissé les plus insignifiants.

3-Istey Muγa igiman kullu
Ur d-iqqimi γas ṭṭaleb d unna g ur illi wul.
 Mora n’a sélectionné que des bourgeons
Il ne reste que l’imam et les plus faibles.

4-Idda Ccabab dda fulkinin
Iqqim-d uzerdix, ittel-aγ aḍu.
 Les plus beaux sont partis
Les moches nous rendent la vie difficile.

5-Idda uciban ad ikkes tamart
Iddu-d Muγa izri-t ur ti-yuwiy.
 Le vieux s’est rasé la barbe.
Mora est venu mais ne l’a pas choisi.

6- A mad yan imdey ur as-tumiẓ,
Iεerra-ten Muγa, izri-t ur ten-yusiy.
 Combien d’hommes ont guetté le départ
Et Mora les avait déshabillés et délaissés!

7-Ṭṭabeε azegzaw ayed newwaγ
Iwet-i s uzeggwaγ isferza-yi.
J’ai tant espéré être tamponné de vert
Mais le rouge m’a paralysé.

8-Ati gimt llebḍ a tirbatin
Iddad Muγa allig aγ ifdeḥ yuγul.
Ô filles, mettez le voile du deuil
Mora nous a humilié avant de partir.

9-A tafuyt ata ur da ttaγd ul-inu
Asmun izreb, akw ur nemsafaḍ
O soleil, tu n’éclaires plus mon cœur
Mon amant est parti sans même me dire «au revoir »

10-Nek ag illa yiγenka
Ima ajmil iga-aγ-ten Muγa.
L’anomalie était en moi;
Mora nous a rendu un service inoubliable.

11-Han awed ṭṭaleb yuwi-t Muγa
Llahrebbi a lejwamiε texwam akw.
Même l’imam a été emmené par Mora,
Pauvres mosquées, elles sont devenues vides.

12-Tut tirmi lured, walu εlaxir
Immet-i yiγejd. Awed Muγa ur aγ-iri.
La gelée a rasé mes roses. Je vis dans la disette.
Même Mora ne veut pas de moi.

13- Wenna ur iddin s Hulanda
Σtun-as icirran
Mayed isskar ? iγwla qillu !
Celui qui n’émigre pas en Hollande alors qu’il a beaucoup d’enfants
Comment s’en sortira-t-il ?
Même le maïs est cher !

14-Hulanda bu luzinat walu degs ccarbun
Amaziγ a ten-ittafan.
Aux pays Bas, ils n’ont pas du charbon. Il n’ya que des usines;
Seul un Amazigh est capable de découvrir ce métal noir.

15-Wellah a Muγa a mer aγ-tgid acwari
Ttawid-aγ s jjbel ur ak-ttafaγ walu.
Je jure par Dieu que je suis prêt à suivre Mora
Même s’il me met un harnais sur le dos
Et qu’il m’oblige à traverser des monts.

16-Zzin d lwalidin aγef kkateγ
Allig i-tkid a jjbel i wayeḍ s Muγa.
C’est l’amour de ma bien-aimée et de mes parents 
Qui m’ont poussé à traverser des monts pour rejoindre Mora.

17-Ddarelbiḍa ag illa ssiwal n iεerrimen,
A Ddarelbiḍa ster γifi!
C’est à Casablanca que siège l’ange des morts qui jugera les jeunes;
Oh, Casablanca, protège-les!

18- A Bu CTM[10] d iddan talat
Ad ak ṛṛẓen izergan, iεmu ccifur.
Ô la CTM qui traverse la rivière
Que tes turbines se cassent et que ton chauffeur soit aveugle.

19- Idda lbabuṛ g waman tawada n ifiγer
Allig zlan asmun-inu.
Le bateau a serpenté la mer,
Mon bien aimé est égaré.

20-Taγ-i tγufi n zzin ur ta ddin
Daccen a lbabur ig ak-ifka aḍar.
Mon amant me manque alors qu’il n’est pas encore parti,
Imaginez ma peine lorsqu’il prendra le bateau.

21-Ar alleγ allig druγ ur ftiγ
Ass-lliγ g idda wadda riγ s Irumiyen.
J’avais tant pleuré à en mourir
Le jour du départ de mon bien aimé chez les chrétiens.

22-Amumeγ amumeγ giγ amm kemmin
Ah a tissmi s uyedda yaγen ul-inu.
Ce qui est arrivé m’a affecté
Et je suis amaigri comme toi ô aiguille!

23-Allah Rebbi a zzin
Ur iγiy i tafuyt wala lexdemt n Irumiyen.
Oh mon Dieu protège mon amant
Qui  ne peut résister ni au soleil ni au dur travail des chrétiens.

24-A Fransa tiḥergit ag tamud
Wenna nn-iddan iγer-d i wayeḍ a nn-iddu.
Ô toi la France, tu es ensorceleuse:
Celui qui te rejoint appelle d’autres au départ.

25- Fransa ayed igan iccki
Ima Merrakec, Ddarelbiḍa nmalan-i.
La France est au bout du monde.
Quant à Casablanca et  Marrakech, elles sont toutes proches.

26-Tzelleε tasa-nu taγ kull ddunit:
Ka Fransa, ka Warzazat, ka Tazarin.
Mon foie a éclaté. Ses fragments sont éparpillés
En France, à Ouarzazat et à Tazarine.

27-Awa Fransa ayed riγ awey-i ẓares.
A wadda riγ nga γifes amuḍin.
C’est en France où j’aimerai que tu m’emmènes oh mon bien aimé.
Et j’en souffre.

28-Fransa as bbiγ tiwriqin
Aliγ igenwan, zriγ arraw-inu.
J’ai préparé mes papiers pour la France,
Et j’ai traversé les cieux tout en abandonnant mes enfants.

29-Sameḥ-i a nnabi-nu mek xḍiγ!
Lemεict ad i-d-yuwin s Irumiyen.
J’implore ton pardon oh prophète!
C’est le besoin qui m’a poussé à aller chez les chrétiens.

30-A Bariz wenna t-id-ikkan
Σṣan Muḥemd, ddan s Irumiyen.
Celui qui part à Paris est un mécréant
Il a désobéi au prophète en partant chez les chrétiens.

31-A mma-nu ttedεu-aγ s lxir.
Ad ur-inn yili lleḥd ammas n Irumiyen.
Maman, implore Dieu
Pour que je ne sois pas inhumé parmi les chrétiens.

32- A mma-nu ttedεu-aγ s lxir.
Hat lliγ g lγar ad ur inḍer γifi.
Maman, implore Dieu
Je suis dans un trou. J’ai peur qu’il s’écroule et qu’il m’ensevelit.

33– A tabrat a mer giγ amm kemmin.
Ad uḍuγ g lbaliza n usmun-inu.
J’aurais aimé être une lettre
Pliée dans la valise de mon bien aimé.

34- Merday nufi mad aγ-as-yarun yat tebrat
i wayedriγ ister awal.
J’aurais aimé trouver quelqu’un pour m’écrire une lettre à mon bien aimé tout en gardant mon secret.

35- Awa rar s lxarij isur tufid ameddakkwel
A bu lidaɛa ssew-as iman.
Ô speakeur, donnes-moi les nouvelles de mon ami à l’étranger
Essaye de le convaincre pour revenir.

36- A Bu tbaγa ɛebri yan kilu
Ad tt-greγ i weḥrir-inu ayeddat isswan aya.
Donnez-moi juste un kilo de tabac, ô marchand !
Pour le mettre dans ma soupe. J’ai envie d’apaiser mon cœur.

37- Allaten a yirgel, allaten a tiṭṭ
Ur inni lbaraj ad-aγ ismun aman.
Pleure ô mon œil
Même un barrage ne retiendra pas nos larmes.

38-Ččan-d akw iserdan i Irumiyen
Ard d-ddun inin-ak nga ayt cciki.
Ils nous reprochent d’être insolents
Eux, ils ont mangé tous les chevaux des chrétiens.

39-A ayt lxarij a ayt lmal.
A widda igan imeddukkal n Irumiyen!
Émigrés fortunés,
Vous êtes les amis des chrétiens!

40-Mer da ttrara ssadaqa lεellat
Trard arraw, yan ad ur iddu s aḍu
Si la bienfaisance nous épargnait des malheurs
Elle aurait empêché nos enfants de partir.
***
Par : Lhoussain Azergui
(Les poèmes ont été collectés, traduits et présentés par l’auteur)

Commentaires

Articles les plus consultés